Déclaration de la FSU
Monsieur le Président du Conseil départemental du Tarn,
Monsieur le Préfet du Tarn,
Madame la Directrice académique des services de l’Éducation Nationale du Tarn,
Mesdames et Messieurs les membres du CDEN,
En préambule, nous souhaitons la bienvenue à Madame Delphine Rochette dans ses nouvelles fonctions de Secrétaire Général des Services de l’Education nationale du Tarn. Nous ne doutons pas qu’elle aura à cœur de promouvoir un dialogue social de qualité.
Nous devons ajouter que nous sommes cette année satisfaits de la qualité des documents fournis par les services de la Direction Académique concernant le second degré. Pour le premier degré, nous avons dû insister quelque peu pour obtenir des documents plus détaillés mais nous y sommes parvenus et le tout dans un climat de courtoisie dont nous nous félicitons.
Mais nos motifs de satisfaction s’arrêtent malheureusement là.
L’année scolaire vient de commencer et, comme tous les ans, l’Éducation Nationale a pu compter lors de la rentrée et pourra compter tout au long de l’année sur le dévouement sans faille des personnels qui s’engagent au quotidien pour la réussite de tous les élèves.
L’engagement des enseignants, des EVS, des AVS, des AESH, des assistants d’éducation, des ATSEM, des agents d’entretien et de service, des agents administratifs des établissements ou de la DSDEN, des IEN, des personnels de direction… permet encore de faire tourner le système… mais pour combien de temps ?
Dans le premier degré
L’amélioration des conditions d’enseignement des élèves et des conditions de travail des enseignants n’est toujours pas à l’ordre du jour. Les 2 créations de postes pour cette rentrée sont bien dérisoires au regard des 383 postes que la FSU estime nécessaires pour assurer un bon fonctionnement du Service Public d’Education dans les écoles du Tarn :
Les effectifs restent très chargés dans les classes, en particulier dans les grosses structures issues des regroupements d’écoles.
Depuis le démantèlement des RASED, la prise en charge des élèves en difficulté n’est quasiment plus qu’à la charge de l’enseignant-e de la classe, laissé-e seul-e face à des problématiques souvent lourdes. La reconstitution des RASED ne semble toujours pas au programme.
La précarité des personnels chargés de l’accompagnement des élèves en situation de handicap reste la norme et ne permet pas un travail serein et continu pourtant indispensable.
Le taux de scolarisation des enfants de moins de 3 ans passe sous la barre des 9%, c’est le taux le plus bas jamais enregistré dans le Tarn. Celui des enfants de maternelle n’a quasiment pas cessé de baisser depuis 15 ans.
Le remplacement des collègues absent-es, faute de moyens suffisants, demeure une inquiétude forte dans les écoles.
Quant aux nouveaux rythmes scolaires, nous avons toujours du mal à voir leurs effets positifs sur le fonctionnement des écoles et l’apprentissage des élèves.
Le SNUipp-FSU a lancé un mot d’ordre auprès de la profession sur la réappropriation de notre temps de travail et appelle, dans ce cadre à arrêter les Activités Pédagogiques Complémentaires. Déjà plus de 37 000 collègues se sont engagés dans l’action.
Dans le Second degré
En collège comme en lycée, nous avons connu déjà des difficultés de remplacement et le recrutement de personnels contractuels, non formés et qui, malgré leur bonne volonté, peinent à entrer dans le métier avec des emplois du temps bien chargés et aucune formation.
De même, nous devons encore attirer l’attention sur les situations fréquentes de collègues nommés sur 2, 3 parfois 4 établissements. C’est vrai pour les titulaires remplaçants mais aussi pour nombre de collègues en postes fixes, ce qui rend impossible pour eux l’implication dans les collectifs pédagogiques.
Concernant les collèges, nous constatons que pour en rester au h/e (c’est à dire le nombre d’heures de cours divisé par le nombre d’élèves) de l’année dernière, il faudrait rajouter 141 heures dans les établissements, c’est-à-dire l’équivalent de 8 équivalents temps plein.
Autrement dit, la réforme du collège se traduit bien, au-delà même de son contenu et des nouveaux programmes, par un nouvel affaiblissement de l’encadrement des élèves.
Si bien que dans presque chaque établissement, c’est encore au moins un niveau qui est touché par des classes surchargées, à plus de 28 voire 29 élèves. Je vous épargne la liste des établissements concernés puisque quasiment tous le sont.
Pour l’Administration, tout va bien car les effectifs rentrent dans les seuils qu’elle a elle-même définis (30 élèves). Pour les collègues et les pédagogues de terrain que nous représentons, la situation n’est bien sûr pas satisfaisante alors que les seuils nationaux étaient définis à 25 élèves par classe au collège au milieu des années 70 à une époque où les difficultés sociales étaient moins grandes qu’aujourd’hui et où les dédoublements étaient monnaie courante.
Quel pédagogue pourrait s’accommoder de cours de LV ou de sciences expérimentales à 29 ou 30 élèves ?
Mais le nombre d’élèves par classes n’épuise pas la problématique de cette rentrée en collège.
Désorganisation et surcharge de travail sont les maîtres mots de cette période.
Après des formations imposées sur la réforme dont le déroulement a souvent été rocambolesque, les professeurs ont dû préparer les programmes sur les 4 niveaux simultanément pendant leur vacances, une première historique.
La mise en place de l’AP et des EPI a conduit à une dégradation des emplois du temps. Dans beaucoup de cas, AP et EPI ont entraîné la suppression des dispositifs d’aide précédents et beaucoup de collègues ont fait l’objet de pressions pour accepter d’y participer. Très peu d’établissements font apparaître les EPI dans l’emploi du temps des élèves et une grande partie de l’AP se fait en classe entière.
En réalité, outre les heures de cours perdues, la réforme prescrit en fait des « usines à gaz », et localement les établissements ont cherché à limiter la casse, ce qui en l’absence de cadrage national produit de grandes disparités d’un collège à l’autre.
Au final, de l’improvisation, des incertitudes, de la désorganisation et une surcharge de travail impressionnante pour les collègues surtout si l’on y ajoute les joyeusetés liées à l’évaluation ou au nouveau DNB.
A ce sujet, nous tenons à relayer l’inquiétude partagée concernant l’EPS. En réponse à une question écrite du député Philippe FOLLIOT, madame la Ministre de l’Education Nationale assure que l’EPS reste une discipline à part entière dont les horaires hebdomadaires ont été maintenus. Nous en prenons acte. Toutefois, nous contestons ses propos quand madame la Ministre affirme que l’EPS ne disparaît pas du DNB. Certes, les enseignants d’EPS vont contribuer à l’évaluation des compétences figurant dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, mais aucune compétence spécifique à leur discipline ne sera désormais prise en compte pour le DNB. L’objectif de la réforme du collège et de son évaluation terminale étant bien de définir quels sont les savoirs fondamentaux que l’Ecole doit transmettre, force est donc de constater qu’aucun savoir spécifique EPS n’est désormais attendu en fin de cycle 4. Disparition des Contrôles en Cours de Formation, disparition même de la compétence du savoir nager du socle : comment les enseignants d’EPS doivent–ils considérer l’importance de leur place au sein du collège ? Alors que toutes les statistiques de ces dernières années ont démontré que les élèves, avec une moyenne nationale autour de 14/20, gagnaient des points en EPS pour le DNB, la réforme raye ce vecteur de réussite original. Faut-il comprendre que les activités physiques et sportives ne représentent plus un champ de culture propre et fondamental au parcours scolaire des collégiens ? Nous pensons qu’il y a là un véritable recul historique de la place de l’EPS au sein du collège et nous demandons donc le retour à une épreuve spécifique EPS comptant pour le DNB.
Au final, une réforme en trompe l’œil qui loin d’explorer les pistes permettant réellement de lutter contre l’échec et les inégalités scolaires (à commencer par la baisse massive du nombre d’élèves par classe), ne fait que poursuivre et aggraver les réformes précédentes, aboutissant au constat récent du CNESCO et à ceux des enquêtes PISA : empilement de réformes qui déstabilisent l’école, baisse globale du niveau et une France devenue championne des inégalités à l’école avec des écarts entre les « meilleurs » et les plus faibles qui s’accroissent toujours.
Toutefois, réjouissons-nous, le ministère bien aidé dans sa quête reconnaissons-le par l’association philanthropique Microsoft, a semble-t-il trouvé une martingale pour améliorer la situation : au lieu de mettre la priorité sur les moyens d’enseignement, il faut miser sur le tout numérique et remplacer « l’ennui » par le jeu.
On décide donc qu’il faut fournir des tablettes aux élèves en collège.
Alors qu’aucune étude ne montre que l’outil numérique améliore l’acquisition des savoirs et des compétences et alors que toutes les études montrent que les enfants passent trop de temps devant des écrans.
Pire, les résultats d’un récent rapport de l’OCDE montrent qu’à caractéristiques socio-démographiques égales, les élèves utilisant très souvent les ordinateurs à l’école obtiennent des résultats bien inférieurs que les autres.
Enfin, outre les problèmes de gestion des tablettes, nous rappelons au passage les propos des autorités sanitaires, comme ceux de l’OMS, de l’Anses (Agence française de sécurité sanitaire) ou du législateur français, qui, en 2016, a interdit le WIFI dans les crèches, l’OMS ayant classé les ondes électromagnétiques parmi les substances « cancérigènes possibles pour l’homme ». Il est a minima indispensable d’équiper d’interrupteurs toutes les bornes Wi-Fi qui ont été installées, à défaut de quoi le CHSCT sera saisi.
Dans les lycées :
Derrière une moyenne de 31,8 élèves par classe, les classes réelles sont majoritairement à 35. Seules quelques divisions sont entre 20 et 24 élèves. Certaines classes sont en sureffectif (33 étudiants pour plusieurs divisions de 30 en STS). Si on ajoute l’obligation d’intégrer les apprentis, et d’accueillir les redoublants le souhaitant, on risque de connaître des situations difficilement gérables.
On relève par ailleurs des écarts importants entre les prévisions d’effectifs et la réalité (+ 104 à Rascol, + 40 à Lavaur et – 57 à Mazamet) si bien que les votes du CA ne peuvent être appliqués puisque la structure évolue entre juin et septembre. D’autre part, les différences d’évolution des effectifs entre les lycées d’Albi sont préoccupantes en raison de leur disparité. Alors que Rascol atteint sont seuil maximum d’accueil, les deux autres lycées voient leurs effectifs diminuer. Un ajustement de la carte scolaire semble donc indispensable.
L’introduction de l’EMC n’est toujours pas financée dans les classes où il n’y avait pas d’ECJS, par exemple en sections technologiques industrielles. Cela a entraîné la perte de dédoublements dans certaines disciplines.
L’accompagnement « personnalisé » se fait souvent en classe entière et se concrétise en autant de situations qu’il y a d’établissements, chacun bricolant comme il peut ce qui remet en cause le principe de l’égalité entre les élèves.
La maintenance informatique, pour la deuxième année est confiée à la Région qui sous traite auprès d’une entreprise privée. Dans un lycée pilote du Tarn, le lycée Rascol, cela se solde par un constat d’échec (délais d’interventions trop longs, interventions peu efficaces, procédures lourdes, résultats décevants, dysfonctionnements fréquents). C’est une nette régression par rapport à l’ancienne situation. Du coup, il devient de plus en plus difficile d’utiliser les ressources informatiques pourtant très importantes dans un lycée technologique. D’ailleurs, les deux responsables informatique qui géraient la situation jusque là , et de manière satisfaisante malgré un net surcroît de travail, ont renoncé à conserver cette responsabilité, abattus devant l’ampleur de la catastrophe. L’un des deux responsables a même affirmé que les procédures mises en place par la Région ne lui permettaient pas d’assurer sa fonction. Une maintenance de proximité est absolument nécessaire.
Concernant les LP, de façon globale, la baisse des moyens affectés conduit à une dégradation continue du climat au sein de nos lycées. Les statistiques de la DEPP l’affirment : la violence au LP est plus forte que dans tous les autres types d’établissements scolaires. Cette année encore, la DGH octroyée aux LP de notre département est inférieure à celle prévue par le CTA . Cette différence de près de 23h impacte forcément les conditions de travail de nos collègues et les conditions d’études des élèves de la voie Pro. Le H/E est porté à 2,174, bien inférieur au H/E moyen de l’académie.
En conclusion
Nous voudrions éviter que la traditionnelle réunion du CDEN consacrée aux conditions de rentrée dans notre département tourne à un exercice déconnecté de la vie réelle.
Tous les indicateurs et toutes les vidéoprojections de diagrammes ne rendront jamais compte de ce que vivent concrètement les personnels, les élèves et leurs familles.
Dégradation continue du service aux usagers et de l’offre éducative, accroissement de la charge de travail et empilement de réformes bâclées sans que jamais le bilan des précédentes ne soit fait, prégnance d’une communication gouvernementale faisant alterner le mépris des personnels et l’autosatisfaction béate, refus de prendre en compte l’expertise des professionnels de terrain…
Ces constats, nous pouvons les étendre facilement à ce qui est vécu par les usagers et les personnels dans la Santé, dans les transports… dans tous les secteurs issus des luttes populaires et notamment du Conseil National de la Résistance pour construire une société de liberté, d’égalité, de fraternité.
Au terme du mandat de F. Hollande, l’état de la France est bien loin des promesses de campagne de ce président qui affirmait pour être élu que le changement c’était maintenant, quitte à fâcher la finance.
Oui, il y a bien des choses qu’on ne devrait pas dire quand on est président et même quand on est candidat. On ne plaisante pas avec le respect du peuple, de la parole donnée, avec les exigences démocratiques sans que d’une manière ou d’une autre, cela vous rattrape.
Quand les paroles et les actes divergent autant, on ne doit malheureusement pas s’étonner des soubresauts qui agitent les peuples, du divorce croissant entre le peuple et ceux qui prétendent imposer envers et contre tous une politique qui accroît les inégalités, la précarité, la violence sociale.
La FSU tient à alerter de manière solennelle : la situation de notre pays est mauvaise, beaucoup de salariés souffrent durement et sont privés d’espoir et le mépris de cette réalité par ceux qui dirigent risque de contribuer à des résultats électoraux très inquiétants dans les mois qui viennent.
Source: fsu81